Le mystère de Porto de León (eBook)

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Quelque part le long du fleuve Amazone...

Mon histoire pourrait se résumer ainsi : être au mauvais endroit au plus mauvais moment. 

J’avais d’abord remarqué un phénomène géologique inquiétant chez moi : une attraction prodigieuse toutes les 72h... pas moyen de déplacer un objet quand le phénomène est en cours. Ça ne dure que quelques secondes... une grande inertie gagne alors le corps et toute la maison. Naturellement je n’avais pas remarqué le phénomène au cours de ma visite et l’agence immobilière s’était bien gardée de m’en avertir... 

— Nous n’avons rien remarqué, monsieur Oliveira... m’avait dit la femme en charge de la vente, avant d’insister sur les mille et un avantages de ma maison, du jardin et du quartier résidentiel où je me trouvais. 

J’aurais dû réfléchir avant de m’installer à la lisière de la jungle. Après tout, je cautionnais d’une certaine manière le feu volontaire ou involontaire qui avait ravagé cette partie de la forêt et donner le champ libre à la construction. Mais je fus bien le premier à emménager, pour la simple raison que ma maison fut la première à être terminée. Et ce fut d’ailleurs la dernière…

On oublie bien vite la déforestation quand on a devant soi un jardin tropical terminé par un sentier qui donne lui-même sur la jungle. J’avais toujours voulu ça : une vue sur la pleine Nature. Dès que je suis sorti de l’orphelinat, j’ai travaillé dur. J’ai erré d’un job à un autre pour économiser, avant de monter ma propre affaire… J’ai fini par me payer une maison et un bout de nature. Mais paradoxalement, je devais tuer cette nature pour en avoir un bout… La propriété est un fléau. Nous sommes un fléau pour cette planète. Même à grand renfort de tri sélectif, je n’arrive plus à m’ôter ça de la tête…

J’étais donc heureux dans mon nouveau chez-moi, avec mon chien Tiberio. Je le promenais chaque matin un peu après l’aube, sur l’artère jalonnée de maisons inachevées. C’est en me réveillant un mardi matin que j’ai compris que les ouvriers ne viendraient plus et que le quartier résidentiel devenait un quartier fantôme…

J’avais pris l’habitude de documenter ma vie et de la poster sur les réseaux sociaux. Je filmais beaucoup mon chien, que j’adorais… tout comme mes abonnés. C’est con, mais c’est ainsi. Je le filmais donc dans la rue. Il courait d’un trottoir à l’autre, humait l’air puis scannait la chaussée de son flair… Soudain, il s’est mis à aboyer puis à courir !

— Tiberio ! reviens ! 

Mais rien à faire. Il était déjà au bout de la rue, là où les ouvriers avaient tout laissé en plan. J’ai rejoint Tiberio. L’air était lourd et j’avais du mal à courir. 

— Tiberio ! ai-je crié avant de siffler pour attirer son attention. Je l’ai alors entendu aboyer… De toute évidence, il était passé derrière les grandes bâches bleues, tenues par des échafaudages montés à la va-vite… J’ai à peine hésité, puis je suis entré sur le chantier, malgré la signalétique qui en interdisait l’entrée… Je dois dire que j’ai toujours été assez curieux. 

J’ai poussé les lourdes bâches et j’ai vu mon chien, en train d’uriner sur une carcasse massive qui sortait du sol.

— Tiberio ! ai-je dit en le réprimandant. Il a fini sa commission le sourire aux babines, puis est venu à mes pieds la tête légèrement inclinée, histoire de dire « hi hi… désolé... ». J’adorais ce chien…

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